Gestion du risque sismique dans les projets de construction III

4 – L’action des séismes sur les sols

4.1 – Action sur les sols lâches

Les vibrations engendrées par un séisme ont tendance à faire évoluer les milieux non cohérents ou faiblement cohérents, initialement peu compacts, vers des états plus denses. Cette situation génère des tassements d’autant plus importants que l’état initial est plus lâche. Dans les sols assez denses, les tassements sont de l’ordre de 0,3 % dans le cas de secousses modérées à forte de longue durée alors qu’ils peuvent atteindre 0,5 % voire 1 % dans les sols médiocres. Ils peuvent prendre une allure catastrophique dans les remblais.

4.2 – La liquéfaction des sols

Les phénomènes de liquéfaction se produisent dans certains sols saturés . Cette situation correspond à une perte totale de la résistance au cisaillement, donc de la capacité portante du sol suite à l’accumulation de pressions interstitielles.

La liquéfaction des sols peut produire deux phénomènes :

  • Au niveau des ouvrages : provoque de petites déformations irréversibles élémentaires ou encore de petits glissements ;
  • Au niveau du sol : provoque des glissements de terrains importants surtout si la couche liquéfiée est inclinée sur l’horizontale.

Figure 4 : Glissements de terrains dus aux séismes

4.3 – Exemples d’influence des sols suite à des séismes

Afin d’illustrer les conséquences de la nature du sol sur les constructions en cas de survenance d’un séisme, nous donnons les exemples suivants :

Séisme de 1755 dit de Lisbonne : L’église de Santa Maria de Belen au Portugal, avec ses voûtes de 19 m de portée et 25m de hauteur, avait bien résisté au cataclysme. Cette église était fondée sur du calcaire compact de grande épaisseur. Il faut noter que l’intensité épicentrale de ce séisme est estimée à XII.

Séisme d’Orléansville (actuellement Wilaya de Chlef – Algérie ) en 1954 : Il a été observé un relèvement local de l’intensité (dans les villages de Bougainville et celui des Cinq-Palmiers) et qui était dû principalement aux conditions du sous sol.

Séisme du 28 juillet 1957 à Mexico : L’intensité observée dans les environs de Mexico était de IV. A Mexico même, on notait un relèvement brutal de l’intensité à IX dans la cuvette lacustre. Les dommages redevenaient progressivement insignifiants dans la zone des collines. Dans ce cas de figure, la corrélation entre les dommages observés et la nature du sous sol apparaît clairement établie.

Séisme du 29/02/1960 à Agadir : les quartiers du Founti et Talborjt, fondés sur des formations quaternaires récentes disposées horizontalement, étaient complètement détruits suite à ce séisme.

4.4 – Interaction sol-structure

L’interaction sol-structure est en général d’autant plus forte que la structure est rigide et le sol déformable, d’autant plus faible que la structure est souple et le sol rigide. Mais on peut noter que l’étude de cette interaction n’est généralement faite que pour des ouvrages exceptionnels eu égard des calculs sophistiqués qu’elle demande.

5 – Importance de la qualité des matériaux et de l’implantation géographique de l’ouvrage

5.1 – Qualité des matériaux

Les analyses des dommages résultant de secousses telluriques ont montré qu’effectivement les constructions ayant fait l’objet d’une exécution soignée ont, en règle générale, un comportement beaucoup plus satisfaisant que celles ayant fait l’objet d’une réalisation moins soignée. L’expérience de l’entreprise de construction dans ce domaine est capitale.

Comme l’a dit Jean DESPEYROUX : « La mise sur pied d’un système efficace d’assurance et de contrôle de la qualité est un élément de succès plus important qu’une illusoire sur-sécurité de calcul. »

5.2 – Implantation de l’ouvrage : Aggravation du risque

Il est nécessaire d’éviter de construire des ouvrages à proximité d’une faille reconnue par les sismologues comme faille active. D’ailleurs lors du séisme de 1994, qui a frappé la ville d’Al Hoceima au nord du Maroc , on a pu constater que les maisons endommagées se trouvaient le long d’une faille voisine à la faille active du Nekkor.

Les professionnels de la construction, ainsi que les assureurs et réassureurs ont intérêt à avoir une carte des failles actives dans le pays où ils opèrent afin d’éviter de construire ou assurer des ouvrages environnants ou limitrophes à ces failles.

Mohamed Jamal BENNOUNA
Ingénieur ESTP Expert MRICS et Docteur en Droit
Professeur associé au CNAM – Paris
Professeur associé à l’Université Internationale de Rabat – École d’architecture
Email : [email protected]

 

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