BTP.. La situation du secteur inquiète, selon des professionnels et des patrons de sociétés

Le secteur du BTP connait une situation inquiétante. Selon des professionnels du secteur et des patrons de sociétés, le chiffre d’affaires accuse un recul, résultat d’une baisse de la commande publique, constituant 75%, jusqu’à 100% des revenus pour certaines sociétés.

En outre, soulignent certains, les banques ne facilitent pas les financements. «Les lignes de crédit ne sont plus renouvelées aussi facilement et les facilités de crédits sont réduites de moitié», indique un professionnel. Cela s’explique par la hausse des créances en souffrance pour les entreprises de ce secteur. «Le taux de contentieux s’est aggravé certes. C’est en raison de la conjugaison de plusieurs facteurs dont l’investissement public qui se réduit, mais aussi et surtout les délais de paiement de l’Etat, toujours aussi longs qu’avant», fait savoir un adhérent à la Fédération nationale du BTP (FNBTP).

Même son de cloche auprès des bureaux d’études et d’ingénierie. «L’administration publique se targue d’avoir fourni des efforts en matière de réduction des délais de paiement. Il faut nuancer, car il ne s’agit que de la trésorerie générale et non de l’amont de la chaîne, comprenant l’établissement des abattements ou des décomptes», précise un responsable d’un bureau d’études.

Selon le Haut Commissariat au Plan (HCP), la valeur ajoutée du secteur du BTP s’est améliorée de 1,2% au 2e trimestre de cette année, contre 0,6% à la même période de l’année précédente. Le taux d’emploi du secteur en quasi-stagnation s’est établi à 9,5%, contre 9,7% à la même période. Et d’après les statistiques de Bank Al-Maghrib, liées à la répartition de l’encours des crédits par secteur d’activité, il en ressort que l’encours global du BTP a atteint à fin juin 95,7 milliards de DH. En 2012, cet encours a connu une baisse de 1%. Entre 2012 et 2016, il a baissé de 7%, pour reprendre sa tendance haussière. Entre 2016 et 2019, il a affiché une hausse de 6%.

«On est certes loin des niveaux de croissance enregistrés avant 2010, où ils atteignaient 20% entre juin 2008 et 2009 ou encore 72% entre juin 2007 et 2006 ; mais l’activité du BTP se maintient toujours», explique un opérateur. A cet égard, il faut rappeler les chantiers lancés dans tout le Maroc et qui requièrent un appel aux sociétés du BTP. Il s’agit de l’extension des lignes des tramways, de la mise à niveau des ports et aéroports, mais aussi la lutte contre l’habitat précaire, de l’adduction de l’eau potable, de la mise en place des ouvrages, entre autres.

D’ailleurs, les nouvelles créations d’entreprises montrent que le secteur se maintenait quand même. Pour l’année 2018, le secteur du BTP et des activités immobilières arrive au 2e rang des créations avec près de 17% de nouvelles entreprises. Ce qui crée une situation de concurrence rude et amène les entreprises à brader leurs prix, d’autant plus que la plupart des institutions publiques adjugent leurs marchés au moins-disant et non au mieux-disant.

Par ailleurs, le mode de financement des activités BTP par les banques a changé. Selon Mehdi Fodda, un cadre bancaire, les banques «n’ont pas resserré les conditions de financement, mais elles sont devenues plus regardantes. Tout projet solide est éligible au financement. Il reste que les banques, actuellement, ont modifié leur politique. Elles ne financent plus uniquement une structure, mais le projet pour lequel un prêt est requis. Et ce, sous plusieurs conditions, à savoir l’identification du projet, ses modalités de remboursement, le montant budgétisé pour chaque étape de son avancement».

«Cette orientation prise par les banques est une manière de pousser les entreprises à structurer leurs dépenses et à affecter les prêts demandés aux projets entamés : c’est la notion de bonne gouvernance et best practice au sens strict. Les banques cherchent un accompagnement sur des deals identifiés et sécurisés dans une optique win-win», souligne la même source.

Néanmoins, avec la reprise de l’activité économique, l’implémentation du contrat-programme du BTP et l’assainissement du marché, tant des structures anarchiques que des opportunistes, le secteur pourrait retrouver son rythme d’évolution et donc mieux repartir sur de bonnes bases.

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